mardi 24 avril 2012

Quand la médiation permet de diviser par 100 le montant d'un contentieux


Cet article (paru dans Les Echos n° 21056 du 10 Novembre 2011 • page 14), est issu du site www.cmap.fr du Centre de Médiation et d'Arbitrage de Paris (CMAP). Le cas présenté illustre parfaitement le processus, la méthode et les bénéfices d'une médiation réussie pour deux grandes entreprises internationales en conflit commercial. Au long d'une médiation conduite par un médiateur agréé CMAP et après explication des malentendus, l'accord amiable final a été co-construit par les deux dirigeants puis rédigé par leurs avocats. 
C'est ce type de médiation que je pratique pour mes clients entrepreneurs de TPE/PME.


Quand la médiation d'un médiateur du CMAP permet de diviser par 100 le montant d'un contentieux


L'entreprise américaine y croyait, à son innovation dans l'électronique. Un ténor du CAC 40 était aussi intéressé. Les lettres d'intention avaient fini par esquisser les grandes lignes d'un contrat de vente et de coopération. Et puis, un jour, la société d'outre-Atlantique ne donne plus suite. Elle le signifie dans un courrier lapidaire, avant de conclure avec le principal concurrent du géant français. Pour ce dernier, une rupture dans ces formes est inacceptable. Il réclame 100 millions de dollars de dommages et intérêts.
Associé au bureau parisien du cabinet canadien d'avocats Fasken Martineau, Jérôme Richardot représente les intérêts de la société américaine. Il propose une médiation au conseil de l'autre partie. Plus par curiosité que par conviction, car ils ne l'ont jamais pratiquée, les deux juristes acceptent. Le résultat sera spectaculaire : en une journée, l'affaire est réglée. Il n'est plus question d'une centaine de millions de dollars, mais de 200.000 euros. L'origine de ce miracle ? La perspicacité d'un avocat belge, désigné comme médiateur. La façon dont il a résolu ce conflit est exemplaire des capacités apaisantes de cette procédure amiable de résolution des conflits. A un moment où les relations interentreprises se durcissent sous l'effet de la crise, cette alternative aux tribunaux ou aux arbitrages mérite d'être mieux connue.
1 laisser chacun vider son sac
Lorsque les avocats des deux sociétés sont tombés d'accord sur le principe d'une médiation, ils sont allés voir le CMAP, Centre de médiation et d'arbitrage de Paris. L'organisme dépend de la chambre de commerce. Il a pu fournir une salle appropriée à ce genre de confrontations, avenue Franklin-Roosevelt. En outre, comme il tient à jour un fichier de médiateurs formés à cette mission sensible, il a été en mesure de suggérer la personne de la situation.
C'est que n'est pas médiateur qui veut. La fonction est certes ouverte à tout un chacun, mais elle requiert des qualités d'écoute et d'empathie qui ne se retrouvent pas chez tous les individus. En l'occurrence, celui qui fut désigné exerçait à Bruxelles la profession d'avocat. Mais ses compétences juridiques n'ont pas eu à servir. « Il a même souhaité en savoir le moins possible sur le fond du dossier », se souvient Jérôme Richardot. J'étais prêt à lui faire parvenir des caisses de pièces, pour appuyer la thèse de mon client, il a juste souhaité un compte rendu factuel des éléments du conflit. »
Les deux avocats se sont entendus sur les personnes qui allaient représenter les entreprises. « Il faut trouver un collaborateur suffisamment élevé dans la hiérarchie pour être en mesure de prendre sur le vif des décisions qui impliquent la société », conseille le juriste. Il n'est certes pas question de mobiliser le PDG, mais le rang de directeur juridique n'est pas suffisant non plus. Il a aussi été entendu que les échanges s'effectueraient en anglais. A partir de là, les échanges pouvaient commencer. « Je dois avouer que le médiateur m'a inquiété au début. Je le trouvais un peu effacé ! » Cela fut au contraire sa grande force : il a laissé les parties vider leur sac. Dans le déluge de récriminations, il a relevé que la société française, par trois fois, n'avait pas répondu à des courriers urgents. Le silence avait fini par être interprété comme une marque de désintérêt. La lettre de fin de contrat était peut-être excessive, mais sa violence formelle trouvait là son origine.
Le représentant du grand groupe français a compris alors beaucoup de choses. D'abord, que, de son côté, le dossier avait trop d'interlocuteurs. Les prises de décision s'étaient diluées, elles avaient même abouti à l'égarement de courriers. S'il avait eu à vivre pareille situation, lui aussi aurait été contrarié. En tout cas, si telle était l'explication de la rupture, ce n'était pas en raison d'un comportement inadmissible. Les Américains n'étaient donc pas des voyous.
2 redonner l'envie de travailler ensemble
Dès cet instant, les problèmes ont changé de dimension. Subitement, il était devenu excusable aux yeux des Français que les Américains soient allés voir quelqu'un d'autre. Ensuite, l'incident était ramené à une péripétie : l'avenir n'était plus bouché. Il redevenait envisageable de travailler ensemble. Enfin, les prétentions de réparations se dégonflaient. Il fallait certes marquer le coup de la rupture, mais plus dans les mêmes proportions.
A la fin de la journée, les deux parties étaient d'accord pour effacer l'ardoise et parler en milliers d'euros plutôt qu'en millions, Les avocats des deux parties ont reçu mandat de rédiger d'ici à un mois le protocole d'accord. Bien entendu, celui-ci resterait confidentiel.
3 un droit écrit par les adversaires réconciliés
Or c'est la première particularité de la médiation. Par rapport à l'arbitrage ou au jugement des tribunaux, la solution vient des parties elles-mêmes. La deuxième, c'est qu'un secret absolu entoure les débats. Enfin, les honoraires du médiateur sont connus d'avance. Ils sont payés avant le début des rencontres. Tous ces avantages sont appréciés en ces temps où les entreprises n'ont plus les moyens de s'engager dans de longs procès. Et surtout, ne veulent surtout pas se fâcher à vie avec un partenaire.

FRANCOIS LE BRUN





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