vendredi 13 janvier 2012

La médiation, un outil au service des entrepreneurs

La médiation, un outil au service des entrepreneurs

Sophie Henry - publié le 12.05.2009, 15h15 dans le JOURNAL DU NET

L'auteur

Sophie HENRY,
Secrétaire Générale, CMAP - Centre de médiation et d'arbitrage de Paris
Dans un contexte de crise, les sources de litiges sont nombreuses. Avant d'en arriver devant le juge, il existe des modes de résolution plus courts et moins coûteux : la médiation et l'arbitrage. Les explications de Sophie Henry.
Chaque entreprise est confrontée quotidiennement à la gestion de nombreux conflits, soit à l'intérieur même de l'organisation (conflits entre salariés, entre actionnaires, entre syndicats et direction, entre deux directions, deux filiales...), soit à l'égard de ses fournisseurs (défaut ou retard de livraison ), de ses clients (contestation sur l'exécution d'une commande, défaut de paiement...) ou de ses partenaires commerciaux (fusion, cession d'activité, concurrence déloyale...). La bonne marche, voire la survie de l'entreprise, dépend de sa capacité à gérer efficacement ses conflits.
Dans un contexte de crise, les sources de litiges peuvent devenir plus nombreuses, notamment de par la situation financière souvent fragilisée de l'ensemble des acteurs économiques. Les entreprises doivent donc pouvoir réagir plus rapidement que d'habitude.

Un recours classique auprès des tribunaux peut leur être préjudiciable car il se révèlera souvent long et onéreux, avec, de surcroît, un manque de visibilité sur l'issue et l'échéance du conflit. Or il existe des outils d'une grande efficacité à disposition des entrepreneurs et décisionnaires de l'entreprise : les MARC ou « Modes Alternatifs de Règlement des Conflits ». Parmi ceux-ci, la médiation et l'arbitrage sont les deux voies les plus communément pratiquées.
En quelques mots, comment fonctionnent l'arbitrage et la médiation ?
L'arbitrage est un mode juridictionnel privé de résolution des conflits.
Les entreprises choisissent de faire trancher leur litige par un ou trois arbitres spécialistes du domaine, qui appliquent les règles de droit et les usages du commerce. La sentence arbitrale s'impose aux entreprises, comme une décision judiciaire. Elle met fin au litige et est exécutoire.

La médiation est un processus amiable de résolution des différends. Elle suppose l'intervention d'un tiers, indépendant, impartial, formé à la médiation, qui a pour mission d'aider les parties à parvenir à une solution négociée, conforme à leurs intérêts respectifs, qui met fin au litige. Le médiateur n'est donc ni un juge, ni un arbitre, mais plutôt un « catalyseur » dont l'objectif est de faciliter les négociations entre les parties afin de les amener à trouver elles-mêmes une solution à leur différend.
La médiation ne peut être mise en oeuvre qu'avec l'accord exprès de toutes les parties en conflit.  Elle sera initiée soit à l'initiative d'une partie, soit à celle des deux de manière conjointe. 
Dès la rédaction du contrat, les parties peuvent également insérer une clause de médiation. Aux termes de cette clause, les parties s'engagent, en cas de litige, à tenter une médiation avant de saisir la justice. Le juge peut également proposer la médiation dans le cadre d'une instance judiciaire en cours.
 
La médiation, voie rapide et efficace de résolution des conflits à moindre coût...
Selon les statistiques de notre Centre de Médiation et d'Arbitrage de Paris, dans 3 dossiers sur 4, les entreprises trouvent une issue favorable à leur conflit, et ce dans un délai moyen de deux mois. Le coût moyen de la médiation, de l'ordre de 5 000 euros (à diviser entre les parties présentes), milite également pour sa mise en oeuvre.

La confidentialité du processus est aussi un de ses grands atouts, puisque la loi prévoit que l'ensemble des échanges intervenus dans le cadre de la médiation ne peut être divulgué. La médiation est de surcroît un processus créatif qui permet aux parties de dépasser la stricte application de la loi, pour régler toutes les dimensions du conflit. Elle favorise la communication entre les parties, permet de rétablir la confiance et par là même la pérennisation des relations contractuelles.

Le succès de ce mode amiable repose enfin sur l'indépendance du médiateur et sur ses aptitudes à faciliter l'écoute et l'échange entre les parties. Il est donc tout à fait indispensable que ce tiers soit formé aux techniques de médiation pour que le service rendu aux entreprises soit optimal. 
 
...mais encore mal connue
 
En dépit de ses atouts indéniables, la médiation reste encore insuffisamment développée en France ! Cet essor très lent de la médiation peut s'expliquer par des raisons culturelles : il est reconnu que, dans notre pays latin, la logique de l'affrontement est le plus souvent préférée à la culture du compromis, plus présente dans la mentalité anglo-saxonne. Ce processus est d'ailleurs beaucoup plus développé au Royaume-Uni et aux Etats-Unis et les entreprises l'ont intégré avec succès dans leur politique de gestion des conflits.
 
Les prescripteurs de la médiation, magistrats, avocats et conseils de l'entreprise, commencent néanmoins à s'approprier le processus et à prendre conscience de son intérêt pour les entreprises et les mentalités évoluent. L'Europe oeuvre aussi pour le développement de la médiation et le Parlement européen a adopté en 2008 une directive portant « sur certains aspects de la médiation civile et commerciale », qui encourage le recours à la médiation.

Un travail d'information et de sensibilisation est également réalisé auprès des chefs d'entreprises, sous l'impulsion de la CCIP, via le CMAP : la Charte de la médiation inter-entreprises signée en 2005 rassemble 45 grandes entreprises françaises qui s'engagent à mettre en oeuvre la médiation ou à insérer des clauses dans leurs contrats. 
 
Gageons que toutes ces initiatives contribueront à mieux faire connaître ce précieux outil de résolution des conflits auprès des entreprises.
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